"Tiger I" japonais

"Tiger I" japonais 

 

What-if

Nous sommes début septembre 1945. Après les deux bombardements nucléaires du 6 août et du 9 août, le gouvernement militaire du général Tojo décide de poursuivre la guerre sur le territoire national. Cette hypothèse a été envisagée par le haut commandement américain qui prévoit un débarquement sur le Japon. Cette opération amphibie hors norme avait pour nom de code « opération Dowfall ».

« Dowfall » qui consiste en deux phases doit débuter le 1er octobre 1945 par « Olympic » nom de code de l’invasion du sud de l'île la plus méridionale du Japon, Kyüshü ,  par 13 divisions, en utilisant l'île d' Okinawa, récemment envahie, comme base avancée.

« Olympic » réussit, la seconde phase de « Dowfall », l’opération « Coronet » doit débuter le 1er mars 1946 et consistait en l'invasion de la plaine de Kantö, près de Tokyo, sur l'île de Honshü, par 23 divisions. Les bases aériennes de Kyūshū, prises lors de l'opération Olympic, auraient alors permis un soutien aérien important à l'opération « Coronet ».

Le total des pertes civiles japonaises et militaires des deux belligérants sont estimées à plusieurs millions de morts. Les autorités japonaises voudraient que la population civile s’investisse dans les combats.

C’est dans ce contexte que les soldats américains affrontent à nouveau un vieil ennemi : le "Tiger I". à la sauce japonaise.

Retour en arrière.

Le Japon a signé avec l’Allemagne nazie le pacte d’Acier formant l’Axe avec l’Italie.

Malgré la distance, l’alliance scellée entre le Japon et l’Allemagne nazie se diversifie aussi en partage d’informations.

De nombreux échanges ont lieu entre le personnel de l’ambassade du Japon à Berlin et le milieu militaro-industriel allemand. 

Les militaires japonais n’ont en effet jamais fait du développement des chars lourds une priorité. A part les grandes étendues chinoises, l’expansionnisme de l’empire du soleil levant est tourné majoritairemet vers des îles. 

La priorité d’équipement des forces était pour la marine et l'aéronavale. Son armée de terre n'était pas vraiment délaissée, mais en termes d'équipement militaire, elle était clairement inférieure à ses homologues européens, qui avaient l'habitude de se battre sur la terre ferme.

Il suffit d’établir une comparaison avec les véhicules blindés japonais pour s'en rendre compte. Même le char japonais produit en série le plus avancé (le Type 97 ShinHoTo Chi-Ha) était inférieur par rapport au T-34 soviétique, au Pz.Kpfw IV allemand ou au Sherman américain. Les chars lourds n'étaient pas du tout utilisés par l'armée japonaise.

L'Empire est en danger.

La faible qualité des chars japonais n'était pas due aux erreurs des chefs militaires. Le principal théâtre de guerre du Japon se trouvait dans les îles du Pacifique. Ce qui impliquait obligatoirement des opérations amphibies pour mener un débarquement. Tous les véhicules et les équipements supplémentaires devaient être transportés par la mer sur de très longues distances, ce qui impliquait des restrictions de poids. La nature du terrain des îles n'était pas non plus adaptée à l'utilisation de véhicules lourds. L'armement de la Chine, le seul rival majeur du Japon sur le continent, était de très mauvaise qualité. Le potentiel de combat des véhicules japonais était plus que suffisant par rapport à l'armée chinoise.

Le 7 décembre 1941, le Japon attaqua les États-Unis. S’en suivit durant six mois, une avancée triomphale de l'armée impériale japonaise sur les îles du Pacifique. Les Japonais envahirent les Philippines, plusieurs îles d'Océanie et une partie de la Nouvelle-Guinée. Pour remédier à la situation, les forces alliées allaient devoir y consacrer beaucoup de temps et d'efforts si elles voulaient les repousser.

Pendant leur domination de la région pacifique, les Japonais créèrent un périmètre défensif, dans lequel les îles jouèrent le rôle de bastions. En février 1943, une série de victoires aéronavales des forces américaines, priva définitivement le Japon de l'initiative stratégique. Le périmètre de défense commençait à s'effondrer sous les attaques. Les Américains se rapprochaient du Japon en prenant les îles les unes après les autres.

Cela conduisit les chefs militaires japonais à réfléchir à la menace d'invasion américaine. Pour résister aux attaques américaines, les Japonais avaient besoin de chars lourds. Leurs projets n'en étaient alors qu'à l'état de concept et aucun d'entre eux n'avait encore été produit. Le type 91 fut abandonné au profit du Type 95 qui fut produit à seulement à 4 exemplaires. Un programme de super-chars lourds expérimental est à l’étude, les Type 100 O-I (2 exemplaires produits) et Type 120 O-I (non produit) d’un poids annoncé de 120 tonnes. 

De leur côté, leurs alliés allemands se dotaient d'un nouveau char lourd : le Pz.Kpfw. VI Tiger.

L'Allemagne répondit à l'appel de son allié de l'Axe. Hiroshi Oshima, l'ambassadeur japonais, fut emmené au camp de Kummersdorf et on lui montra les chaînes de production des « Tiger » dans les usines Henschel. D'une manière générale, l'ambassadeur se familiarisa avec le produit. Enthousiasmé par cette idée, il engagea des négociations avec le ministère de l'armement allemand. 

En 1943, une mission militaire se rend sur le champ de bataille de Koursk afin de découvrir l’usage des blindés allemands. Le char « Tiger I » les impressionne fortement par son blindage et sa puissance de feu.

En septembre, quatre officiers japonais visitent une chaîne de production de « Tiger I » et décident d’acheter un exemplaire. Les Japonais reçurent deux lots de documentation technique ainsi que les plans pour le fabriquer au japon. 

L'intérêt d'acheter les chars avaient été évoqué car le coût d'un "Tiger" était d'environ 300 000 reichsmarks en 1943 mais le ministère de l'armement et Henschel demandaient 645 000 reichsmarks. Le prix était vertigineux mais ça ne signifiait pas que les Allemands voulaient profiter de leur allié d'outre-mer. Tout d'abord, le char était fourni avec des munitions, une radio et des optiques. Deuxièmement, les Allemands étaient prêts à démonter et à emballer le char avant de l'envoyer au Japon. De plus, il semble que le coût de la documentation technique était également inclus dans le prix.

Quel était l'intérêt de démonter le char ? La transaction en elle-même ne posait aucun problème, contrairement au transport. La possibilité d'utiliser des navires de surface fut ignorée, car les Alliés maîtrisaient la mer Méditerranée et l'Atlantique. Le transport sous-marin  porte-avions devint donc la seule possibilité. Mais cette alternative était loin d'être idéale, car peu de vaisseaux étaient capables de transporter un énorme châssis de 30 tonnes. La construction des porte-avions sous-marins qui possédaient les caractéristiques correspondantes n'étaient pas terminées et le Tiger avait beaucoup de chances de rencontrer des problèmes durant son itinéraire vers le Japon. D'après les estimations les plus optimistes, l'acheteur pouvait espérer une livraison avant décembre 1944.

L’exemplaire portant le numéro de fabrication 25 1455 arrive à Bordeaux accompagné d’un char Panther le 17 février 1944 en vue d’embarquer pour le Japon. En février 1944, les Japonais payèrent la commande et prirent officiellement possession du "Tiger," mais celui-ci resta quand même un poids mort. À l'été 1944, les Alliés débarquèrent en Normandie et mirent l'Allemagne en difficulté.

Suite à la décision du commandement suprême de l'armée allemande datant du 21 septembre 1944, le "Tiger" japonais fut loué (ou réquisitionné, selon d'autres sources) et confié aux forces terrestres. C'est ainsi qu'il fut perdu quelque part sur le front de l'Ouest. L’affaire tourne court et les deux chars sont « prêtés » à l’Allemagne. Le "Tiger I" rejoint le Schewe SS-Abteilung 101 et sa trace se perd dans les combats de Normandie. 

Si le "Tiger" n’avait peu d’utilité dans les combats menés dans les îles du Pacifique, il aurait peut-être plus de chance en étant engagé dans la défense des îles du Japon dont l’étendue est plus vaste car le Tiger I a été conçu pour « chasser » sur de grandes étendues. Son canon à l’époque est capable de venir à bout de tous les chars déployés par les Américains sur le théâtre du Pacifique. 

Dans l’hypothèse que le transfert des deux blindés eut lieu, pendant un certain temps des sources affirmaient que les blindés démontés en plusieurs fardeaux avaient pu être acheminés par sous-marins au Japon.  

Partant de cette hypothèse peu probable mais permettant d’étayer le what-if : Arrivé au Japon, le développement de ce type de chars se heurte à un problème. L’industrie lourde nippone n’est que balbutiante et l’archipel manque drastiquement de matières premières et de matériaux stratégiques. Comment fabriquer une machine de guerre aussi « technique » demandant énormément d’acier et de matériaux stratégiques. Il fallait construire de nouvelles usines équipées de chaînes de fabrication spécialisée. Mettre en place une industrie sidérurgique pour la conception du blindage, ainsi que l’élaboration de pièces de rechange hautement technologique. Détourner une nombreuse main-d’œuvre spécialisée.

Et même si la production avait été lancée, il aurait fallu repenser toute la doctrine d’emploi surtout en défensive ainsi que la logistique faramineuse inhérente à ce type de chars hautement sophistiqué. 

 

Sources : Un Tiger pour le Japon Batailles et blindée n°89 Loïc Becker"

https://worldoftanks.eu/fr/news/history/victim-circumstance-japan-tiger/